Radio charente

Les habitants du village sont en ébullition il ne se passe jamais rien dsns le village ou leurs vies et là il ont trouvé un sujet de conversation au moins pour 6 mois: j’ai mis à la porte ma tante qui s’est empressée de tout raconter en déformant légèrement la vérité. Je le savais. C’est hier qu’on me l’a dit, la fille de Jeanine B. Se fait coiffer par Sandra D. La fille de Jeanine B. a dit « tu es au courant que la fille de Doudou a mis à la porte Sylvette ? » Sandra D. en a parlé à Mumu hier l’amie de maman, Mumu a dit « je pense que tu ne sais pas que manou a été insultée de teigne et d’ordure » effectivement elle ne savait pas. Tata Sylvette n’a pas tout dit. Et Sandra D. Tu savais que tata Sylvette a gentiment dit que fallait pas fumer ? Que c’était de sa faute si elle était comme ça ? Sandra D. la coiffeuse ne savait pas non plus. Tata Sylvette n’a pas tout bien raconté.

Hier une voisine vautour a téléphoné à maman, une de celles qui vient gratter des infos, c’est Jeanine B. pour venir la voir, gentiment j’ai envoyé un sms en expliquant que non les visites étaient finies, d’ailleurs il y a un mot sur la porte tu a dû le remarquer, merci. 2 h après elle mettait sa tête dans la chambre de maman en disant « où qu’elle est? » j’ai encore mis quelqu’un à la porte, Jeanine B. qui m’a demandé « elle est consciente? » pour aller baver après « oui bien sûr totalement » « elle se nourrit? » « oui elle a englouti le tiramisu fait par telle personne » « elle voit plus personne? » « ah si, elle voit les gens qu’elle aime et qui l’aiment, nous sommes 4 » « tu crois que y’en a pour longtemps ? » « oh oui à peu près un an merci au revoir », je l’ai vu se diriger vers la maison de mon oncle, le frère de maman, ils sont tout près il vit sur le même terrain que maman, le terrain de papy Jean, pour aller raconter. Va baver Jeanine B. à tonton Jacques qui détourne le regard à chaque fois qu’il me voit depuis mars.

C’est la principale angoisse de maman à l’heure actuelle, qu’on m’attaque, qu’on me maudisse, qu’on me fasse chier, que les pia pia pia charentais gonflent. Ça et de plus pouvoir fumer de clopes jusqu’à la fin. On a les problèmes relatifs à notre mort. Ma mère est une victime je suis un bourreau c’est la grosse différence entre nous deux, depuis toujours, je la rassure, les gens importants savent la vérité et que je me suis occupée d’elle, elle a peur qu’à l’église ou lorsqu’on la veillera il y ait des attaques je la rassure, il y aura des attaques bien sûr, mais je mettrai les gens à la porte s’il le faut, je crierai, j’insulterai, je gerberai à la gueule des gens… et puis « tu sais bien que moi je suis un pitbull, une bourrine, je m’épanouis dans le conflit, la guerre, c’est là où je me révèle le plus, je suis au fond de la piscine je donne un dernier coup de pied pour remonter » toute ma vie elle m’a reproché mon « caractère » « tu aimes trop la guerre emmanuelle » même quand j’avais 12 ans, alors : « maman c’est ce caractère là qui fait que je n’ai peur de rien maintenant et surtout pas de débiles mentaux qui passent leur vie à faire des conserves » j’attaquerai, je défendrai, le discours à l’église ne plaira pas, je rappellerai qu’au début nous étions deux, cette mère-fille et moi née de père inconnu, nous étions deux et la famille B n’était pas très présente, parce que c’était la honte de la famille B alors d’avoir une fille-mère. Elle est allée accoucher dans un autre département, pas en Charente. En Charente maritime car elle avait honte de ce qu’elle faisait subir. C’était comme ça en 1983. Je suis « un choix de vie » de la part de ma mère, ne pas se marier, tromper, faire une enfant seule en 1983 avec la stigmatisation, j’étais une batarde, ma mère une pute y’a pas d’autres mots, nous étions deux au début on sera deux à la fin et dans l’église. Elle la victime moi le bourreau, on a échangé nos vies, nos corps c’est le principe des vases communicants, elle a toujours été maigre ou très mince et elle est grande, en avril elle faisait 45 kilos elle en fait 60 maintenant à cause de la cortisone, j’ai toujours pris du poids, et je suis petite là c’est moi qui ait perdu 15 kilos. Elle a toujours eu une tension haute, 14/15, et le cœur qui bat vite. Elle est maintenant à 10 de tension et son cœur bat très peu. Moi j’ai toujours eu une petite tension 10,6 ou 11, et le coeur qui bat lentement à cause de mes médicaments, grâce à la natation. Là chaque matin l’aide soignante prend ma tension. J’ai 15, 14 dans le meilleur des cas et mon coeur bat trop vite, je le sens lorsque je me couche le soir je l’entends battre, trop fort. Pendant quelques semaines je me suis dit que j’allais faire un arrêt cardiaque lorsqu’elle partirait, parfois j’ai mal au coeur comme un malaise, parfois j’ai mal au coeur comme un chagrin.

« Je devrais plus m’inquiéter pour toi quand même » je lui dis que non, ta seule inquiétude là maman c’est que je ne trouve pas du sirop d’orgeat pour demain, elle en veut, elle sourit « oui j’en veux vraiment » elle veut de la purée mousline, du riz au lait fait par son amie, du paté, du boudin, des glaces, des rochers Suchard, des pêches de vigne, des nouilles au gruyère, des huîtres et des chouquettes. Voilà pour la dernière semaine. « Mais je devrais m’inquiéter pour toi quand même, tu ne pas vas tenir » je lui explique que si, que je m’effondrerai dans 6 mois et puis « maman j’envisage de me faire niquer par le maire avant mon départ alors tu sais ça va je pense pas que à la mort » « c’est un chaud lapin vas y, tous les hommes que tu peux aimer, aime-les »

Tous les matins j’ai envie de gerber, je vais me blinder de bouffe cette semaine c’est la dernière, j’angoisse de la nuit du 11 au 12 déjà, ça sera notre dernière nuit ensemble. Les soins palliatifs m’ont dit à part, que lorsque les perfusions seront mises la communication avec maman ne pourra plus se faire normalement. Et après on partira pour quelques jours où elle va s’éteindre, le plus vite possible s’il vous plaît je ne pourrai pas tenir 7 jours dans cette maison de merde qui me fout les boules à attendre et faire des cartons de déménagements, pourvu qu’en 48 h tout soit fini qu’elle fasse un anévrisme. L’avant dernier compte à rebours commence demain, lundi le 5. Le 12 tout changera. Je vais me blinder de bouffe cette semaine car après je gerberai tout ça à la gueule des vautours. J’ai encore 15 kilos à cracher. 

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