14 ans

Paris 13 Les Gobelins. Mes Olympiades  à moi j’y ai vécu 10 ans c’est mon quartier. Il y a deux jeunes filles qui parlent fort en se montrant des trucs sur l’iPad, celle qui parle s’appelle Marie, quand elle parle d’elle même elle se nomme et utilise la troisième personne du singulier. Marie et son amie attendent Tom. Qui est Tom? « Tom c’est juste un ami hein » explique Marie, Tom s’est fait larguer il y a peu, Marie explique à son amie que Tom était dans un état lamentable, Marie a dû le ramasser « à la petite cuillère » elle a passé un samedi avec Tom récemment, elle lui a conseillé « de chialer. T’as envie de chialer tu chiales c’est simple ». Quand Marie s’adresse à son amie elle lui dit toujours « meuf » et donc elle explique qu’elle a bien aidé Tom, elle dit « meuf on a commencé  à parler il était 23 h il chiale il arrête de chialer il est 4 h du mat »Marie est très bavarde elle a passé des examens et « c’était ouf meuf » elle parle de son prof qu’elle appelle apparement « mec » elle est allée voir son prof pour lui dire « mec ça va pas du tout tu m’as mis 12 j’ai fait 3 cas pratiques ça vaut pas 12 ça va pas ça » Marie conteste sa note. Pour se dédouaner de son échec elle explique que « de toutes façons 12 c’est une des meilleures notes » ( elle est à Nanterre ) et dans sa classe y’a une « meuf » qui a « chialé 25 minutes en voyant sa note on avait pas que ça à foutre » Marie était saoulée « elle m’a pris mes kleenex » du coup elle ne savait pas « comment faire pour se maquiller après hein? » mais Marie reprend vite du poil de la bête malgré un teint terne, finalement sa note elle s’en « bat les yeuk  » car elle compte reprendre le taf de ses parents « au pire » et d’ailleurs elle a passé un week-end récemment « dans le Sud. J’en reviens » ( on imagine Biarritz ou Arcachon)  et donc le Sud ? « C’était incroyable meuf » Marie a fait «  52 000 km meuf » et elle est «  arrivée hyper tard » car « y’a pas de oui-go tu le crois ça? » bref Marie « débarque » en retard pour « le vernissage de mon père et le shooting de ma mère t’imagines l’ambiance ? » à priori pas celle des gilets jaunes. Au vernissage de « daddy » Marie rencontre une mannequin célèbre, cette mannequin quand elle a son masque « on dirait elle est magnifique, elle a des yeux et une voix hyper sexy » Marie « adore » mais quand la mannequin retire le masque « elle est horrible, un problème de peau et de dents  et même sa voix n’est plus sexy »  et pas de kleenex pour aider cette pauvre mannequin. Finalement Marie était « saoulée » des vernissages et shooting « C’est chiant quoi » donc elle décide « sur un coup de tête » de partir en Espagne avec Tom, celui qu’elles attendent et qu’elle a ramassé à la petite cuillère rapport à sa rupture. 

Tom en Espagne ça va toujours pas, Marie explique qu’il est malade «  Le mec fait que vomir ! » du coup Marie lui donne un bon conseil « Prends  un cacheton t’es en Espagne on dirait t’es à Trappes  t’es en Espagne,  en Espagne »  elle répète en Espagne deux fois et conclue en louant la tolérance de nos cousins hispaniques «  tu peux prendre des trucs ça compte pas en Espagne » mais le fond du problème ça n’est pas la rupture de Tom, le problème c’est qu’en fait Tom est amoureux de Marie.  Mais « Tom il est moche » enfin « meuf » la copine se met à parler : «  L’amour n’a pas de sexe, l’amour n’a pas de taille, l’amour n’a pas de visage » Marie absolument pas d’accord avec sa copine qui fait du Marc Levy : « Oui ben chez  les autres hein pas pour Tom et moi hein ! » Marie veut savoir la situation de « meuf » sa copine, « et toi alors ? » Meuf s’est aussi faite larguer : « Il me propose un PACS le lendemain il me quitte , qui propose un PACS et après tu te fais tej? » un mec trop moche sûrement. Mais Meuf a rencontré quelqu’un cette semaine « à Nanterre! » un garçon « très gentil, un étranger » Marie ADOOOOOORE sortir avec des étrangers elle s’inquiète « il parle français au moins ? » Meuf répond que l’étranger en question est « québécois » Marie n’a pas sa réponse : « ? Et alors ? Il parle anglais du coup? » pas de réponse à expliquer, vive le Québec libre à Marie Tom vient d’arriver avec son sweat informe par dessus un manteau de fourrure. Ils partent au moment où arrivent trois personnes juste à côté de moi, deux femmes un homme l’homme a 60 ans une femme   50/60 à peu près la dernière 40/45 ans. La quadragénaire a ce physique des gens pas vieux mais fans de chanteurs hyper ringards et elle annonce tout de suite le thème de la rencontre : Jean-Luc Lahaye.  « Tu te rends compte ? » « C’est pas la première fois ! » dit la plus vieille, en plus  dans l’histoire « y’a sa fille ! Elle va aller en prison ah bah ça fait bien ! » la quinquagénaire a entendu que la copine de Jean Luc Lahaye était « une coiffeuse. Une Chinoise. Une coiffeuse Chinoise » et ça ça semble « pas possible, pas Jean-Luc Lahaye  avec une Chinoise! » alors que les gamines de 13 ans ça y’a aucun mal à le croire.  En plus cette coiffeuse Chinoise elle est « très désagréable » ça on le sait grâce à la presse. « Impossible » répète la quadra, d’ailleurs la quinquagénaire s’est sûrement trompée, pas possible  que « jean Luc » soit avec une coiffeuse Chinoise : « Tu te trompes je pense que c’est sa fille la coiffeuse Chinoise » la quinquagénaire: « bah !!! La fille  de Jean-Luc Lahaye elle  PEUT PAS être chinoise enfin ! » la quadra qui n’en revient toujours  pas : « bah t’en sais quoi? T’as vu où elle est née ? » l’homme interrompt la conversation il annonce ce qu’il va prendre : « un chocolat chaud » les deux femmes se rejoignent sur cette boisson : « un chocolat ! Comme un enfant ! T’as qu’à prendre de la soupe aussi de la soupe à l’oignon ! » la serveuse arrive pour prendre la commande mais avant ça l’homme lui dit qu’elle doit « porter le masque » la serveuse lui explique que « non c’est pas obligatoire pour les serveurs » « si » « non » « si » « non » « bon un Perrier un café et un chocolat MADAME ! » en attendant les boissons dans lesquelles la serveuse va cracher on revient sur le papa chanteur. « Quand on y pense quand même Jean-Luc il suit un peu l’éducation nationale »  l’homme ne comprend pas il dit « bah pourquoi? » la quadra explique avec un ton de pimbêche « tu sais qu’à l’école maternelle on leur apprend à être homosexuel ! » la quinquagénaire n’en revient pas et ne remet pas du tout en question cette affirmation : « AH BON!!!?? » donc oui en France en 2021 on apprend aux enfants de 3 ans à être homo et après aller danser au banana café et pas que :« les petites filles ne peuvent plus jouer à la cuisine » « ah ça je ne veux pas les filles ça doit cuisiner! » explique la quinquagénaire  « ah oui d’ailleurs c’est le premier truc que m’a dit le monsieur de Bordeaux » le monsieur de Bordeaux c’est un homme que la quadra a rencontré, mais Bordeaux c’était trop loin alors elle a rencontré « un monsieur de St maur c’est près » mais le monsieur était veuf et elle « ne veut pas dormir dans les draps d’une morte » en fait je crois que c’est un triple rencard sur 3 générations. Enfin l’homme devient bavard, lui aussi recherche quelqu’un « franchement aller au resto seul quelle horreur »  Tant et si bien que lorsqu’il était encore actif lorsqu’il dormait dans des hôtels y’avait  des soirs où il ne mangeait « rien !! Je ne mangeais pas hein ! Je prenais une bière et voilà souvent à côté des toilettes d’ailleurs ça me coupait l’appétit de voir les gens arriver au resto en couple » la quinqua calme direct les envies de top chef de l’homme « moi en ce qui me concerne c’est impossible que je me remette avec  quelqu’un. Je ne supporterai pas »  « bon ben voilà pont final y’a plus rien à dire là » constate l’homme qui réalise sûrement que son chocolat chaud lui a coûté une soirée resto à deux. 

La suite vous ne la connaîtrez pas j’ai dû m’arrêter d’écrire, ma suite à moi  elle ne peut pas être racontée comme ça alors qu’elle s’est déroulée dans ce café. Au moment où j’écoutais les conversations du trio, un homme  que je n’avais pas vu depuis 14 ans a poussé les portes du café, on s’est vus et reconnus, la dernière fois c’était rue des Gobelins chez moi. 

M Écrit par :

Un commentaire

  1. Chouquette
    8 novembre 2021
    Reply

    C’est beau la banalité de la vie. Ou pas.

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