J’en ai vu 4 ou 5 depuis que je suis ici la nuit charentaise n’a rien à voir avec la nuit parisienne, l’avantage aussi de se lever à 4 h du matin.
On a beaucoup rigolé le lundi 12, le matin alors qu’elle n’avait pas pris ses médocs, elle a mangé une pêche de vigne et la moitié d’une poire. Dans ses médicaments il y avait la cortisone bien sur, un truc à la con pour la thyroïde, un médicament pour le coeur, un médicament pour ses anévrismes, un médicament pour l’épilepsie. En tout 12 cachets. La veille, dimanche, je lui ai dit « on se dit au revoir ? » elle m’a dit « non on ne parle pas de demain » mais on a quand même dit des mots d’amour un peu. Et lundi 12 au matin alors qu’avant de prendre la cortisone elle était toujours très confuse, ça a été. Ça a tellement été qu’on a vachement rigolé de 6 h à 9h30, d’abord on s’est toutes les 4 moquées de Régis, qui n’est pas vraiment un aidant, je dois lui faire le petit déjeuner, il ouvre le café sur le côté et dimanche au supermarché j’avais 2 poches remplies, un pack d’eau et 24 œufs et je portais tout, maman a dit « ohlalalalalalala que de lala c’est insupportable » décemment elle n’aurait pas pu vivre avce Régis, Mumu et jeanine en ont profité pour tacler leurs maris et puis voilà j’ai quand même dit que Régis avait apporté au moins 18 fromages et autant de vin.
Après j’ai dit à maman que j’avais encore vu une étoile filante cette nuit et que c’était fou dis donc, elle m’a dit « c’est chouette les étoiles filantes » et que j’étais « chanceuse » oui effectivement très chanceuse vraiment.
Et puis on a continué à rigoler et parler. A 10 h je l’ai laissé se reposer, c’est le moment où là medecin de l’HAD m’a appelé pour me dire que maman serait endormie mercedi, si elle ne part pas avant, on a tous espéré qu’elle parte naturellement déjà pour pas que moi j’assiste à ça, et ensuite pour me la laisser un peu une dernière fois, j’avais prévenu Régis et les amies si je me rendais compte du décès de maman je comptais la garder pour moi quelques heures sans prévenir personne, quelques heures avant que tout s’enchaine, encore un peu, peut être que j’aurais pris une douche ou fait une lessive. On avait de « l’espoir » la morphine agit sur la respiration ils ont un baromètre pour calculer ça, il faut avoir entre 10 et 70 respirations par minute, samedi elle avait 10, la limite, dimanche elle avait 6. La respiration est modifiée j’ai chronométré toute la journée, dimanche matin elle passait 25 secondes sans respirer. Dimanche après midi 28 secondes. Dimanche soir 34 secondes. Je me suis dit elle va partir dans la nuit ça sera mieux et non, lundi matin elle m’a dit « bonjour mon amour »
A midi, lundi ils sont venus lui mettre une autre pompe d’un produit pour prévenir la mega crise d’épilepsie ambiance l’exorciste. J’ai détesté ces soins palliatifs, jusqu’à hier ils nous ont dit qu’elle n’aurait que de la morphine, basta et lundi « elle a arrêté les médicaments ? » oui, « alors on arrive avec les pompes pour l’épilepsie » impression d’avoir été testées, pour voir notre détermination c’est insupportable, exécrable, on aurait dû faire sans eux tellement ça aurait évité toutes ces heures d’entretien, de questions, de jugements, de menaces, j’ai détesté ces soins palliatifs qui ont sûrement su qu’ils seraient là dès le début mais qui ont estimé que c’était mieux de jouer au chat et à la souris avec nous, qu’ils aillent se faire mettre bien profond, quand ça ira mieux je ferai un courrier.
Le lundi soir elle était bien on a parlé jusqu’à 21 h, de la mort qui a toujours fait partie de sa vie « je crois que tous les jours de ma vie j’ai pensé à la mort » c’est pas une surprise je le savais. Elle m’a dit « je pense que ça va être bien » l’après pour elle, je lui ai demandé comment elle imaginait la mort, est ce qu’elle pense qu’elle aura après, son physique de quand elle avait 30 ans, 40 ans? Elle sait pas trop mais elle imagine « un jardin avec des glaïeuls et des pivoines qui tiendront tu sais les pivoines ça tient pas mais c’est beau » je lui demande si elle pense revoir papy et mamie ? « Bien sur ! Enfin papy, mamie je la reverrai pas » je suis un peu soulagée elle a pas oublié que sa mère était une grosse conne, « c’est vrai que ta mère c’était une connasse bah comme ta sœur en fait ! » et puis elle reverra notre chat qui a vécu 22 ans donc elle conclut « pour moi ça va aller » mais elle a peur pour moi, « il faut que tu y arrives emmanuelle que tu sois forte et bien entourée » quand elle m’appelle Emmanuelle c’est toujours très solennel j’ai l’impression de l’entendre à 15 ans quand elle me disait « tu peux pas insulter tes profs emmanuelle » elle va aussi revoir « là-bas » Mémé Andrea sa grand mère qui nous a sauvées d’un accident donc ( je ne suis toujours pas convaincue de cette histoire)Andrea, papy et elle « me protègeront » et puis elle me dit « tu sais quand tu es prête à partir il faut que ça aille vite moi je suis prête totalement » elle est prête, moi absolument pas, l’essentiel c’est elle, c’est à ce moment là que je lui dis que mercredi 14 a priori elle aura une sédation profonde. « Si c’est le jour, c’est le jour! » et après on a rigolé, j’ai pleuré elle non pas du tout elle m’a dit « ne pleure pas » j’ai dit « j’ai quand même le droit d’être triste arrête de me casser les couilles putain c’est dingue ça » elle a répondu « d’accord. Je voudrais dormir » j’ai pris un cachet, on a dormi. 4 h réveil pour moi, mardi matin je dors dans la même chambre qu’elle, je n’entends aucun bruit, je suis stressée j’arrache la prise de mon téléphone, je m’approche et une grande respiration émane d’elle. Voilà c’est demain
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